(UN) La demoiselle que vous voyez là est une sorte de petite luciole, elle s’agite en tout sens, brille d’une certaine innocence, une impatience, une jeunesse éternelle, une volonté de brûler les étapes, d’être parfaite, de trouver une famille, et pourtant, elle se brûle les ailes, et parfois s’épuise, mais ce qu’elle redoute le plus au fond c’est le noir. (DEUX) Car la nuit venue, les ombres s’agrandissent. Quand le soleil, s’est couché, et la Lune levée, alors apparaissent les morts. Tous viennent la voir même si tous ne parlent pas forcément. Certains disent la vérité d’autres des mensonges. S’ils évoquent parfois le futur c’est cryptique, énigmatique et d’un mystère insondable. La petite ne comprend pas. Elle redoute plus que tout la visite d’une mère à la gueule trop défoncée pour être reconnaissable. (TROIS) Le silence, l’absence, la solitude et l’abandon la terrifie. Qui aime après tout ces sentiments ? Personne. Ils sont parfaitement inconfortable. Mais chez elle, ils évoquent une vérité, une blessure qui ne s’est jamais refermée, et qui amène avec elle une frustration et une rage qu’elle ne peut combler, un vide qu’elle ne peut remplir. (QUATRE) Triste enfant quand elle est touchée par cette mélancolie insondable, elle ne se laisse alors que rarement aller, virevoltant sans cesse, parlant toujours de tout et de rien, jamais de ce qui est important. Les maux de l’âme sont tabous. Elle peut écouter les peines d’autrui mais les siennes demeurent à jamais secrète. (CINQ) Elle dit des choses parfois, comme les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais. Il faut l’avouer, elle aime les aventures. Qu’on la surprenne, qu’on la pousse dans ses retranchements, qu’on la sorte de sa zone de confort. Son âme a besoin d’être nourrie par tout et n’importe quoi. (SIX) Petite sauvage, en dépit de tout, ce qu’elle préfère c’est les marginaux et les gens bizarres, les freak, les monstres, les tordus et les vicieux, les gens cabossés par la vie, comme elle, plus qu’elle, ceux qui ne jugent pas, et qu’elle considère souvent avec curiosité, envie, à qui elle accorde bien souvent plus facilement sa confiance qu’aux autres, les normaux qu’elle ne comprend que si difficilement. (SEPT) Méfiante, la gosse n’accorde que peu sa confiance. Il lui faut parfois attendre des années avant de le faire. Distante et secrète, elle s’amourache pourtant de quelques âmes, surtout les cabossés. Les autres demeurent un mystère dangereux. (HUIT) Relative innocence, sa jeunesse en est la cause, mais aussi une volonté farouche de s’accrocher à cette enfance perdue, vendue, gâchée, volée. Détresse de l’être qui réalise qu’il n’a jamais connu les rares plaisirs en ce bas monde et qui désespère de ne jamais les connaître. Voilà l’enfantine âme est une illusion, la femme enfant, une construction habile. Un fantasme élaboré, reconstruit, établi sur des clichés et des idées reçues. Une amorce de paradis au milieu de l’enfer. (NEUF) Fascinée par le morbide, attirée par la cruauté, le bel ange n’est pas aussi doux et gentil qu’il en a l’air. Il y a en elle une part obscure, comme en chacun, qui se révèle plus facilement en présence des Macbeth, sans doute parce qu’elle tient d’eux ce goût pour les armes blanches, cette admiration sans borne pour la mort, cet attachement pour tout ce qui est lié à la douleur, la sienne oui, mais celle des autres plus encore. Ainsi, cette manie de lécher son propre sang, de créer la plaie afin que le sang coule, ou d’aimer provoquer la même chose chez l’autre pourrait bien être à l’origine du fait de son héritage paternel. (DIX) Sexualité débridée, la douce n’a jamais eu de papa pour lui dire de se méfier des hommes, et quand elle a compris que le sexe lui donnait un certain pouvoir, un plaisir aussi, elle s’y est adonné. Bien sûr, elle a connu de mauvaises expériences qui l’ont calmée sur le sujet. C’est surtout la peur assez phobique de tomber enceinte qui la retient le plus souvent. Elle reste convaincue que c’est elle grandissant dans le ventre de sa mère qui a provoqué la folie de cette dernière.